Le 12 septembre jour où l’Eglise fête le saint nom de Marie, nous nous retrouvions tous ravis à l’idée de pouvoir participer à la promenade annuelle qui, comme un heureux rituel revient en ce mois de septembre pour entraîner cinquante de nos membres à la découverte de nouvelles églises de notre diocèse.
Nous prîmes la route qui nous conduisit dans la riante vallée de la Colie, plus exactement à Varise, village victime de la barbarie des armées prussiennes qui, en représailles à la défense opposée par ses habitants, détruisit dans les premiers jours du mois d’octobre 1870, 73 des 75 maisons de la petite agglomération. La vénérable église dédiée aux apôtres Pierre et Paul a pu être heureusement sauvée et restaurée. Nous avons pu en admirer le flanc sud bordé d’un rustique caquetoire. Après avoir été aimablement accueillis par Mme Françoise Tourne adjointe au maire, nous avons pu découvrir un édifice clair et bien entretenu. Tous les regards convergèrent vers les précieux vestiges d’une fresque du début du XIIIe s décorant les murs de l’abside d’époque romane découverts fortuitement par l’abbé Morizeau curé du lieu en 1939 à l’occasion de l’enlèvement de lambris de bois tout vermoulus. Situés de part et d’autre de la fenêtre axiale nous pouvons reconnaître du côté nord la Déposition de croix et l’arrivée des Saintes femmes au tombeau et au sud deux scènes de la vie de saint Jean Baptiste, le Baptême du Christ et le Repas chez Hérode.
Il nous a suffi de parcourir quelques kilomètres pour parvenir à Loigny- la-Bataille autre village théâtre des combats de la guerre de 1870. Nous sommes entrés par le musée de la guerre de 1870 accolé au flanc nord de l’église qui, comme nous l’expliqua notre jeune guide, remplace celle qui servit d’hôpital de campagne pour les blessés victimes des violents combats qui opposèrent aux alentours les armées françaises et allemandes le 2 décembre 1870. Construite de 1872 à 1877 par l’architecte Lucien Douillard dans un style romano byzantin très à la mode à l’époque, elle a été conçue comme un véritable mémorial élevé en hommage aux 1200 morts dont les ossements retrouvés dans les plaines environnantes reposent dans l’ossuaire situé dans la crypte. Tout près des restes de ces combattants est couché sous une dalle portant l’inscription « Miles Christi » le général Louis Gaston de Sonis qui, à la tête des zouaves pontificaux et des volontaires de l’Ouest combattit héroïquement sous l’étendard du Sacré-Cœur. Malgré les travaux menés depuis quelques jours dans la crypte nous avons pu pénétrer dans ce lieu de mémoire.
Parvenus au terme de la matinée il nous fallait songer à aller déjeuner. Pour se faire Hervé Fougeron, membre du conseil d’administration, nous ouvrit les grilles de sa charmante gentilhommière du XVIIe posée au milieu d’un vaste parc. Notre hôte et son épouse nous comblèrent de leur prévenance afin que nous puissions passer un agréable moment de convivialité autour d’un repas partagé face à l’immense perspective tracée dans les frondaisons du parc. A peine installés autour des tables, un invité imprévu fit une rapide apparition pour nous servir en guise apéritif, une fraîche ondée, mais conscient de son insolente indiscrétion il s’esquiva rapidement pour faire place aux rayons du soleil. Nous avons pu alors écouter avec attention l’histoire des lieux racontée sur le ton d’un témoignage passionné par Hervé Fougeron qui nous fit revivre plus de deux siècles d’histoire depuis que ses aïeux acquirent cette demeure à la fin du XVIIe. En particulier il nous narra avec brio le rôle joué par son ancêtre Armand Fougeron juge de paix d’Orgères dans l’arrestation et le jugement des redoutables chauffeurs en janvier 1798
H. Fourgeron
Après la visite de la chapelle privée érigée en 1873 à la suite d’un vœu prononcé au cours de la guerre de 1870, nous sommes montés dans le car pour nous rendre dans l’église de Tillay-le-Péneux. Placée sous le patronage de saint Aignan évêque d’Orléans au Ve siècle, l’église terminée par un chevet plat présente la caractéristique de posséder deux nefs voûtées d’ogives en pierre fait rare dans la région où la plupart des églises sont couvertes d’un lambris de bois. On nous fit remarquer que la différence de profil des ogives entre le chœur et la nef et l’absence de chapiteaux à la retombée des voûtes dans cette dernière attestent de deux périodes de construction, début XIIIe et fin XVe s. Autre intérêt le banc d’œuvre à double dossier portant la signature du maître menuisier Denis Lecomte et du sculpteur René Bâton, portant la date de 1775. En fait lesdits dossiers appartenaient à deux meubles distincts d’époques différentes.
l’église de Tillay le Péneux
Après quelques kilomètres nous nous sommes retrouvés à Mervilliers devant une immense ferme et un modeste mur de pierre : dans ce mur une porte métallique qui une fois ouverte nous permis d’entrer dans un petit terrain envahi par l’herbe mais c’est alors que nous tournant vers la gauche nous découvrîmes la chose la plus inattendue, la plus surprenante, la plus incroyable, la plus étonnante, la plus rare, la plus curieuse… un magnifique tympan roman logé dans un banal mur de pierres. Une telle découverte exigeait bien une explication que nous apporta notre président. Ce mur était celui de l’ancienne église du village désaffectée en 1821 et transformée en bâtiment agricole. Le tympan appartenait à la porte d’entrée sud de l’église. Il fut redécouvert en 1849 sous le feuillage touffu d’un espalier. C’est alors que archéologues et historiens se penchèrent sur lui pour le décrypter et ils en vinrent à la conclusion suivante ; il s’agit de la représentation d’une donation « per thécam ». On y voit au centre un personnage assis sur une sorte de trône, il s’agit du donataire qui reçoit d’un soldat revêtu d’une cote de maille une sorte de vase cylindrique, dite boite en grec thecam, contenant de la terre et des cailloux symbolisant comme dans les ventes romaines le bien foncier donné. Assistent à la cérémonie, à gauche l’écuyer tenant l’épée de son maître à la main et la bride de son cheval, à droite, le prêtre placé devant un autel sur lequel est posé un calice bénit l’évènement et tout à fait à droite un petit moine qui écrit l’acte de donation sur un long phylactère qui se développe sur toute la courbe du tympan. Du haut du ciel le Christ sort des cieux, entouré de deux anges thuriféraires pour bénir le donateur alors que le doigt de Dieu pointe l’autel sur lequel est célébrée la messe. Certains de nos adhérents se dirigent alors vers ce que fut le chevet de l’église et, se plaisent à découvrir deux colonnettes romanes à chapiteaux, autres précieux vestiges de cette ancienne église.
Il est plus de 16h, l’heure de nous rendre sur le lieu de notre dernière étape ; l’église Saint Étienne Saint Eutrope Du Puiset. Nous y rencontrons Michel Rabovin Président de l’association des Amis des seigneurs du Puiset qui nous donne lecture d’un document descriptif de ce vaste édifice roman constitué d’une nef voûtée d’un berceau de bois plâtré, séparée des deux bas-côtés par des arcades reposant sur dix forts piliers et d’un vaste chœur occupé par un retable construit en 1739. Les participants se dispersèrent alors pour admirer une statue en bois polychrome où ils purent reconnaître à la pierre, reposant posée sur sa tête, le patron de l’église et découvrir dans la sacristie ce que certains prirent pour une vaste cheminée alors qu’il s’agissait des vestiges d’un retable en pierre d’un autel disparu. L’abbé Jean Pierre Cornic curé de la paroisse nous fit ensuite l’amitié de célébrer les vêpres qui conclurent comme habituellement dans l’action de grâce cette journée chaleureuse et amicale dont l’artisan et le concepteur fut Hervé Fougeron qui en remerciement reçu l’ovation enthousiaste de tous les participants au moment de notre retour vers Chartres.